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Devoir de vigilance

Réengager ses collaborateurs...à l'heure du devoir de vigilance.

Pourquoi est-ce si délicat ?

Communiquer avec subtilité et justesse à l’heure du devoir de vigilance.

Le devoir de vigilance, c’est quoi exactement ? L’impact et les risques

La loi sur le devoir de vigilance datant de 2017 impose une nouvelle obligation pour les grandes entreprises françaises (de plus de 5.000 salariés en France et 10.000 salariés dans le monde) : elles doivent établir et mettre en oeuvre un plan de vigilance en mesure de détecter et de prévenir des atteintes aux droits humains et à l'environnement sur toute leur chaîne de valeur. Cette loi de 2017 impose donc aux grandes entreprises de publier chaque année un rapport permettant d'identifier et de prévenir une série de risques, à commencer par les atteintes à l'environnement. 

L'objectif est d'aller dans le sens d'un « capitalisme plus responsable », indique Bercy pour qualifier le principe de cette loi.

Le devoir de vigilance : avant tout un risque réputationnel à anticiper : l’exemple de BNP Paribas

Il y a quelques semaines, s'achevait le délai légal de trois mois qui permet à BNP Paribas de répondre à Oxfam France, Les Amis de la Terre, et Notre affaire à tous. Les trois ONG l'ont mis en demeure, le 26 octobre dernier, d'améliorer son « plan de vigilance » et de cesser de financer tout nouveau projet d'investissement dans les énergies fossiles, au nom de la lutte contre le réchauffement climatique.

Une mise en cause publique qui décourage et agace les collaborateurs

C’est peu dire que l'action des associations environnementales a agacé au sein de la première banque de la zone euro. Cette mise en cause publique, suivie d'une action coup de poing - l'affichage d'une banderole pointant BNP Paribas lors du Climate Finance Day, l'événement climatique annuel de la place de Paris - a suscité un choc en interne. D'autant que sur le fond, la banque a le sentiment de se mobiliser largement. Dans son plan stratégique à horizon 2025, le document faisant référence pour encadrer l'action du groupe, le pilier « durable » (« sustainability ») est central. 

La nouvelle a cueilli à froid l'équipe dirigeante et les nombreux salariés directement concernés, dont les spécialistes de la modélisation du risque climatique et les responsables de grands comptes… 

Communication interne tous azimuts pour remobiliser les collaborateurs déçus… 

Dans les semaines qui ont suivi la mise en demeure, le groupe a communiqué tous azimuts en interne pour rappeler sa stratégie climatique : des messages ont été passés auprès des équipes commerciales, voire lors de réunions avec les partenaires sociaux, sur l'intranet du groupe ou en plus petit comité. 

La tension monte entre les ONG et les grandes entreprises

L'épisode marque surtout un coup de froid dans les relations entre la banque et certains défenseurs de l'environnement. Non seulement la loi de 2017 est passée par là, et d'autres multinationales ont elles aussi été mises en cause au nom du devoir de vigilance, comme TotalEnergies, Carrefour ou plus récemment Danone. 

Mais surtout, la notion d'urgence climatique s'est imposée : l'année 2022 est la plus chaude jamais enregistrée en France.

Pour les associations environnementales, BNP Paribas devrait utiliser son pouvoir financier pour amener TotalEnergies à stopper les nouveaux projets hydrocarbures. Un sujet plus compliqué qu'il n'y paraît, sur lequel les banques ont tendance à ne pas communiquer.

Entreprises et gouvernement se renvoient la balle

Le dialogue est devenu beaucoup moins fluide, car le débat entre ONG et entreprises est entré dans le dur. Lorsqu'il s'agissait de cesser de financer le développement du charbon, une énergie plutôt en fin de vie en France - et « dégueulasse » pour l'environnement, selon un banquier - le sujet faisait relativement consensus. D'autant que les pouvoirs publics poussaient clairement en ce sens.

Le vrai sujet : à quel moment arrêter le développement de nouveaux projets d’énergies fossiles ?

Mais le sujet est différent pour le pétrole et le gaz. L'Agence internationale de l'Energie (AIE) qui fait référence en la matière, a publié en 2021 son scénario pour atteindre la neutralité carbone. Les ONG considèrent que ce scénario préconise l'arrêt immédiat du développement de nouveaux projets pétroliers et gaziers. Un point de vue qui ne fait pas l'unanimité : l'AIE est en effet plus nuancée, la fin des nouveaux projets ne devant intervenir que lorsque la demande en pétrole et en gaz aura baissé.

Dans ce contexte, les financements accordés à TotalEnergies, qui continue de développer de nouveaux projets, cristallisent l'attention. 

Un enjeu moins pécuniaire que réputationnel

Au-delà de ces débats, à quel point le bras de fer engagé par les trois ONG est-il risqué pour BNP Paribas ? l'enjeu n'est en tout cas pas pécuniaire, en revanche, il existe un risque d'image, que la banque pourrait limiter en donnant des gages, afin d'éviter que l'affaire aille en justice. 

Quelle solution, quelle conclusion ?

Parmi les pistes éventuelles, les entreprises concernées pourraient tenter de faire preuve de plus de transparence dans la présentation de leurs engagements.

Notre conclusion : gare aux entreprises qui ne seraient pas sincères dans leur démarche. Selon un sondage PRE x Harris Interactive de mars 2022, deux jeunes sur trois (65 %) se disent prêts à renoncer à postuler dans une entreprise qui ne prendrait pas suffisamment en compte les enjeux environnementaux.

Marie Krafft, 10 janvier 2023